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sábado, 11 de mayo de 2013

RACHID KHALESS [9889]




Rachid Khaless nació en 1966 en Marruecos. Es poeta, pintor y traductor. Se presenta como una voz singular en la poesía marroquí contemporánea.



Pronto comenzó a escribir influenciado por escritores de todo tipo. Envía los textos a una amante ficticia y se apropia de los principales textos de una manera que es a la vez divertido y práctico. Sin embargo, el inconsciente juega un paso decisivo para el aprendizaje de la lengua francesa. Más tarde, el Baudelaire poeta que descubre rápidamente se convirtió en su punto de referencia.

Cursó estudios de postgrado en la Universidad Ibn Tofail en Kenitra y conoció escritores que le marcaron: Edmond Amran El Maleh, Abdelhak Serhane o Mohamed Loakira. Un año más tarde, se unió a la Ecole Normale Supérieure de Meknes y se graduó en 1992, de profesor de secundaria. Fue asignado a la ciudad de Safi, cargo que ocupó durante cinco años. En 1999, se graduó como profesor asociado de las letras francesas.
Publicó su primera colección de canciones del desierto, que aparecen en el Harmattan en 2004, mientras que Marruecos inicia la "Equidad y Reconciliación", proceso que trató de rehabilitar a los ex presos políticos y, finalmente, cortar con los "años de plomo", iniciados al terror bajo Hassan II. 





Extracto 2



Del río que, en lo oscuro, roda sus olvidos, amo las piedras y amo más el agua que corre, libre de su camino. Como el líquido que repta viajo a la orilla de una casa violenta donde la luz vendrá a encadenarse. Tengo dudas sobre mi camino, y serpenteo allí donde la razón es línea recta. Lo desconocido es mi cosecha y de mi mano amaso mi cólera y la ofrezco en pan. Nada contradice mis entrañas. Modelo los vientos, pulo las piedras,-las mismas aceradas-, cincelo la arcilla y el aluvión, engaño la ilusión y a las pestañas mismas las maquillo, a la cisura le ofrezco las muletas-¡y me río de eso!- a la muerte le doy, mientras que la noche esposa lo blanco, de mi ladera, doy una línea del horizonte.




Rachid Khaless (Marruecos)

Publicado en http://www.maisondelapoesie.be/textes_et_poemes/textes_et_poemes.php?id=236
Traducido del francés por Myriam Rozenberg









1.



Tabula raza…



Signe ton baptême pyromane ! 

Craque allumette crépite feu de géhenne épée écarlate et éclats acérés
Brûle parchemins anciens et futurs défais et legs et royaumes et royautés
Au bûcher ce monde désuet
À commencer par l’antiquité – surtout moderne ! 


Crevons l’abcès

À l’enfer aux mille feux délétères l’allégeance ! 
La religion, l’espérance je les jette tout autant que les livres et les paradis qu’ils promettent
Et que je sois damné ! Et qu’on me lapide !
Je m’en moque. Je suis déjà ailleurs
Et ni ce monde ni l’autre ne comptent ni ne me troublent…


Ma poitrine se gonfle d’un souffle ample, souffle baroque mais aux résonances inédites :



Que ma proie s’offre à moi non dans le consentement mais dans la ténacité : le saccage n’en sera que plus beau

Guerre guerre : olifants et fuel ! 


Ma main revient des confins sombres de l’absence… Elle est chargée de qebrit splendide et la déflagration sera. À pulvériser le galet lisse de l’orgueil 



Et c’est de salves de syllabes et de sons brusques que je vous dynamiterai



Coups coupants mes mots entailleront vos faces et poitrines à vous saigner à blanc



J’allumerai mille étoiles dans vos yeux – ça s’appelle mise en orbite ! – et je les saccagerai à coups d’ongles tranchants et de dissidence



Vous tomberez en poussière comme fruits de cave puis je ramasserai vos cendres et pelure je les exposerai aux vents

[Vous serez partout et ne serez nulles parts]
Vous serez éternels dans mon néant 




2.



Que m’importent vos trésors et vos empires

Et vous mes non-frères que j’ai acculés au pied des décombres


Que m’importent vos royaumes et le futur

Je suis déjà affranchi des calendes crucifiées dans vos mains


Et jamais je ne graviterai autour des constellations fixées dans la voûte céleste

J’ai choisi les marges et les courbes au lieu du charnier des cadavres linéaires


J’ai formé des desseins cruels en vue d’embarquement neufs et d’antidote



Et j’ai brûlé vers la poésie pour toujours !



Bêchez vos saisons donnez-leur des noms et des fleurs

Conviez des convives à goûter à leur fruit et à chanter votre louange


J’en ai assez de toutes ces nourritures avariées qu’on sert à toutes solennités ou pour d’obscurs rites

Elles avaient été apprêtées avec toutes épices par des taverniers aux mains factices 


Je m’octroie quant à moi tout le trouble que me doit mon souffle raffermi à des alcools tenaces



Et je ne déclame ni ne chante…

Je dis mes fièvres séculaires
Et des musiques autres
Vastes filles d’onctions de feu


À moi ! À moi la virginité des incendies ! 

Feu ! Feu sur tout. À commencer par ces feuillets barbares…


Je resplendis à l’étendue unique ! Je l’appelle sur toutes mes ruines…



Sans cesse elle me renouvellera









Qu’il répande sa lèpre dans mes veines ce siècle de croisés et de trouvères 
Moi j’y tiens ma place – et tant pis pour la postérité – et j’en mourrais à chaque instant s’il fallait abdiquer mes utopies
J’œuvre dans le silence et m’appartiens chaque fois que j’approche de ma mort


Je descendais

Au milieu des ruines
Sonder l’essence du feu
Qui couve sous la rouille
De la peau et sans cesse
Me déchire


Je suis toute absence toute omniprésence et je perce aisément les coeurs de mes ennemis :



« À l’écart la charogne ! » s’écrie l’un d’eux



Je confirme : je suis de la race des perfides ; j’ai bu un vin dense dont les toxines sont de la fabrique du tonnerre et vos quolibets me m’atteignent pas



Et les guerres je les connais toutes. Et les vierges arènes…



Enfant déjà j’aurai livré toutes les bagarres : 



L’alerte venait des cimes

Des immeubles : démons terribles nous endossions notre audace et des armures formés de nos mains – manches de balais volés et morceaux de zinc – nous étions de la tribu d’Antar et nos rivaux les Dhobyane – nous étions prêts à prolonger d’un siècle encore Dahis et al-Ghabra’ 


Ma voix devenait rauque sous mon masque, je commandais des guérilleros pas plus hauts que des arbres nains

Nous avions des frontières à conquérir, des audaces à châtier
Que de feux s’allumaient dans nos yeux quand au bout de la ruelle s’élevait le chant de la bande rivale – c’étaient de vrais tremblements de crécelles ! 
L’arène était d’infinis pièges et à perte de vue les colonnes étaient prêtes à l’assaut
Barricades torches cimeterres… Nous érigions des chemises trouées en guise d’étendards


Et soudain s’ébranlait la troupe aux aguets 

Le ténor – un rondouillet au gosier net – entonnait le chant de notre République


Bagarres bagarres sans fin…



C’était le sang qui sanctifiait nos solitudes !






3.



À présent j’usine des sons féroces qu’elle surgisse cette silhouette bâtarde dans ma vie que je l’exhibe sur la place publique que je lance les enchères je suis Orphée et j’écorche ma voix – dans l’appel à ma prière de l’absent : je suis déjà loin en moi ailleurs – je suis un faux et un renégat et j’érigerai mon poignard qu’on me relègue aux marges du panthéon et autres éphémérides – qu’est-ce que ça peut me foutre ? – je suis déjà cadavre. Par le passé j’ai épousé Christ arrimé à ma chair et je lui ai donné le dernier baiser et je tuerai tous les autres Christ et les Bouddhas et lacérerais les parchemins du Hedjaz qu’ils processionnent dans mon champ de mines – je dynamiterai icônes et livres de Babel à Byzance et je vous menace et je charge je choisis la guerre je choisis l’escalade







Dès le commencement j’ai entrevu la fin…


Et j’ai rompu le lien qui m’aurait asservi au monde : j’étais seul en enfer et j’ordonnais des musiques rauques pour tenter le miracle



Et j’ai cheminé dans ma cervelle une légende et portant dans les mains des cailloux bruts 



J’ai tissé à l’horizon une couleur et j’ai conspiré contre l’argile et son miracle – j’étais le siège de tous les sacrilèges



Et survint la folie – jeune épouse pour d’éternelles noces – j’avais alors fini de saccager en moi toute la lumière



Je me suis donné pleinement la vie et cent fois j’ai rêvé ma mort : A et O brouillés et cap vers un territoire constamment ouvert … 



C’étaient des voyages sans fin – et de toutes sortes : 



À l’âge de raison grondait dans ma tête le ras-le-bol et je projetais de tuer en moi la présence de tous les pères



Un jour j’ai tagué sur les murs du lycée des inscriptions hérétiques 



Tracts et slogans rouges étaient mes premiers coïts – aguerri je m’apprêtais à ourdir toutes les conspirations



En cours d’arabe j’ai excité la meute à la controverse – j’avais à cette époque-là une voix miraculeuse et mon cœur avait l’empire sur toute race 



J’ai vu les mots engendrer une vraie algarade : chacun cognait sur le visage à portée de son poing



Mais j’ai survécu à la catastrophe avec l’envie de raffermir mon trop-plein de fureur



Et ma tête a été mise à prix j’étais mûr au gibet



Et je m’octroyai alors toute l’étendue du risque :



Quand le gong a retenti – les chardonnerets ayant fui loin – j’ai convoyé de rouges romances vers des régions vierges. C’était Allal qui tenait la cadence : nos pas sonnaient à même nos cœurs



Nous surprenions déjà l’horizon reprisé de la soie de nos mains, la mort qui n’était plus qu’un corbeau jeté sur la blanche solitude de l’aube. Et nous exultions aux territoires purs conquis par la seule emprise de nos pensées



Le pays cessait d’être une terre d’épouvante et nous l’élevions sur nos épaules et sentions son poids



À notre sang nous inventions des légendes et d’amples prisons à nos futures épouses 



C’étaient des rêves sans fin que nous consumions avec notre dernière cigarette



Enfin pour sceller cette alliance nous reniions nos races le torse plein de souffles bruts et de livres de révoltes



C’était en un banal jour de commencement du monde !






Je suis le conquérant flottant sur les violentes lames et bientôt je brûlerai les barques et les parfums de ma terre natale… 


Voilà que j’accoste dans un port que hante le sang 



Devant moi mon ennemi et derrière éclats et cendre 



[Et je suis loin dans l’éblouissement… Mais mon coeur bat d’une belle audace 



Et c’est mille fois mort que je reviendrai au monde : lentement j’escaladerai le versant abrupt de la vie]



La houle je l’ai tractée à la rompre sur mes phalanges formées aux flammes ; c’était avec une force que je dois à mon haleine et à mes muscles 



Et j’ai tiré le torse plein de cartes de prodigieuses cargaisons 



Alors que les vagues me traversaient d’un bout à l’autre – dans un bouleversement musical 



C’est absous d’humanité que je m’octroyais l’immensité du monde – ce minuscule champ de bataille !



Extraits de Guerre totale

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