Rachid Khaless nació en 1966 en Marruecos. Es poeta, pintor y traductor. Se presenta como una voz singular en la poesía marroquí contemporánea.
Pronto comenzó a escribir influenciado por escritores de todo tipo. Envía los textos a una amante ficticia y se apropia de los principales textos de una manera que es a la vez divertido y práctico. Sin embargo, el inconsciente juega un paso decisivo para el aprendizaje de la lengua francesa. Más tarde, el Baudelaire poeta que descubre rápidamente se convirtió en su punto de referencia.
Cursó estudios de postgrado en la Universidad Ibn Tofail en Kenitra y conoció escritores que le marcaron: Edmond Amran El Maleh, Abdelhak Serhane o Mohamed Loakira. Un año más tarde, se unió a la Ecole Normale Supérieure de Meknes y se graduó en 1992, de profesor de secundaria. Fue asignado a la ciudad de Safi, cargo que ocupó durante cinco años. En 1999, se graduó como profesor asociado de las letras francesas.
Publicó su primera colección de canciones del desierto, que aparecen en el Harmattan en 2004, mientras que Marruecos inicia la "Equidad y Reconciliación", proceso que trató de rehabilitar a los ex presos políticos y, finalmente, cortar con los "años de plomo", iniciados al terror bajo Hassan II.
Extracto 2
Del río que, en lo oscuro, roda sus olvidos, amo las piedras y amo más el agua que corre, libre de su camino. Como el líquido que repta viajo a la orilla de una casa violenta donde la luz vendrá a encadenarse. Tengo dudas sobre mi camino, y serpenteo allí donde la razón es línea recta. Lo desconocido es mi cosecha y de mi mano amaso mi cólera y la ofrezco en pan. Nada contradice mis entrañas. Modelo los vientos, pulo las piedras,-las mismas aceradas-, cincelo la arcilla y el aluvión, engaño la ilusión y a las pestañas mismas las maquillo, a la cisura le ofrezco las muletas-¡y me río de eso!- a la muerte le doy, mientras que la noche esposa lo blanco, de mi ladera, doy una línea del horizonte.
Rachid Khaless (Marruecos)
Publicado en http://www.maisondelapoesie.be/textes_et_poemes/textes_et_poemes.php?id=236
Traducido del francés por Myriam Rozenberg
1.
Tabula raza
Signe ton baptême pyromane !
Craque allumette crépite feu de géhenne épée écarlate et éclats acérés
Brûle parchemins anciens et futurs défais et legs et royaumes et royautés
Au bûcher ce monde désuet
À commencer par lantiquité surtout moderne !
Crevons labcès
À lenfer aux mille feux délétères lallégeance !
La religion, lespérance je les jette tout autant que les livres et les paradis quils promettent
Et que je sois damné ! Et quon me lapide !
Je men moque. Je suis déjà ailleurs
Et ni ce monde ni lautre ne comptent ni ne me troublent
Ma poitrine se gonfle dun souffle ample, souffle baroque mais aux résonances inédites :
Que ma proie soffre à moi non dans le consentement mais dans la ténacité : le saccage nen sera que plus beau
Guerre guerre : olifants et fuel !
Ma main revient des confins sombres de labsence
Elle est chargée de qebrit splendide et la déflagration sera. À pulvériser le galet lisse de lorgueil
Et cest de salves de syllabes et de sons brusques que je vous dynamiterai
Coups coupants mes mots entailleront vos faces et poitrines à vous saigner à blanc
Jallumerai mille étoiles dans vos yeux ça sappelle mise en orbite ! et je les saccagerai à coups dongles tranchants et de dissidence
Vous tomberez en poussière comme fruits de cave puis je ramasserai vos cendres et pelure je les exposerai aux vents
[Vous serez partout et ne serez nulles parts]
Vous serez éternels dans mon néant
2.
Que mimportent vos trésors et vos empires
Et vous mes non-frères que jai acculés au pied des décombres
Que mimportent vos royaumes et le futur
Je suis déjà affranchi des calendes crucifiées dans vos mains
Et jamais je ne graviterai autour des constellations fixées dans la voûte céleste
Jai choisi les marges et les courbes au lieu du charnier des cadavres linéaires
Jai formé des desseins cruels en vue dembarquement neufs et dantidote
Et jai brûlé vers la poésie pour toujours !
Bêchez vos saisons donnez-leur des noms et des fleurs
Conviez des convives à goûter à leur fruit et à chanter votre louange
Jen ai assez de toutes ces nourritures avariées quon sert à toutes solennités ou pour dobscurs rites
Elles avaient été apprêtées avec toutes épices par des taverniers aux mains factices
Je moctroie quant à moi tout le trouble que me doit mon souffle raffermi à des alcools tenaces
Et je ne déclame ni ne chante
Je dis mes fièvres séculaires
Et des musiques autres
Vastes filles donctions de feu
À moi ! À moi la virginité des incendies !
Feu ! Feu sur tout. À commencer par ces feuillets barbares
Je resplendis à létendue unique ! Je lappelle sur toutes mes ruines
Sans cesse elle me renouvellera
Quil répande sa lèpre dans mes veines ce siècle de croisés et de trouvères
Moi jy tiens ma place et tant pis pour la postérité et jen mourrais à chaque instant sil fallait abdiquer mes utopies
Juvre dans le silence et mappartiens chaque fois que japproche de ma mort
Je descendais
Au milieu des ruines
Sonder lessence du feu
Qui couve sous la rouille
De la peau et sans cesse
Me déchire
Je suis toute absence toute omniprésence et je perce aisément les coeurs de mes ennemis :
« À lécart la charogne ! » sécrie lun deux
Je confirme : je suis de la race des perfides ; jai bu un vin dense dont les toxines sont de la fabrique du tonnerre et vos quolibets me matteignent pas
Et les guerres je les connais toutes. Et les vierges arènes
Enfant déjà jaurai livré toutes les bagarres :
Lalerte venait des cimes
Des immeubles : démons terribles nous endossions notre audace et des armures formés de nos mains manches de balais volés et morceaux de zinc nous étions de la tribu dAntar et nos rivaux les Dhobyane nous étions prêts à prolonger dun siècle encore Dahis et al-Ghabra
Ma voix devenait rauque sous mon masque, je commandais des guérilleros pas plus hauts que des arbres nains
Nous avions des frontières à conquérir, des audaces à châtier
Que de feux sallumaient dans nos yeux quand au bout de la ruelle sélevait le chant de la bande rivale cétaient de vrais tremblements de crécelles !
Larène était dinfinis pièges et à perte de vue les colonnes étaient prêtes à lassaut
Barricades torches cimeterres
Nous érigions des chemises trouées en guise détendards
Et soudain sébranlait la troupe aux aguets
Le ténor un rondouillet au gosier net entonnait le chant de notre République
Bagarres bagarres sans fin
Cétait le sang qui sanctifiait nos solitudes !
3.
À présent jusine des sons féroces quelle surgisse cette silhouette bâtarde dans ma vie que je lexhibe sur la place publique que je lance les enchères je suis Orphée et jécorche ma voix dans lappel à ma prière de labsent : je suis déjà loin en moi ailleurs je suis un faux et un renégat et jérigerai mon poignard quon me relègue aux marges du panthéon et autres éphémérides quest-ce que ça peut me foutre ? je suis déjà cadavre. Par le passé jai épousé Christ arrimé à ma chair et je lui ai donné le dernier baiser et je tuerai tous les autres Christ et les Bouddhas et lacérerais les parchemins du Hedjaz quils processionnent dans mon champ de mines je dynamiterai icônes et livres de Babel à Byzance et je vous menace et je charge je choisis la guerre je choisis lescalade
Dès le commencement jai entrevu la fin
Et jai rompu le lien qui maurait asservi au monde : jétais seul en enfer et jordonnais des musiques rauques pour tenter le miracle
Et jai cheminé dans ma cervelle une légende et portant dans les mains des cailloux bruts
Jai tissé à lhorizon une couleur et jai conspiré contre largile et son miracle jétais le siège de tous les sacrilèges
Et survint la folie jeune épouse pour déternelles noces javais alors fini de saccager en moi toute la lumière
Je me suis donné pleinement la vie et cent fois jai rêvé ma mort : A et O brouillés et cap vers un territoire constamment ouvert
Cétaient des voyages sans fin et de toutes sortes :
À lâge de raison grondait dans ma tête le ras-le-bol et je projetais de tuer en moi la présence de tous les pères
Un jour jai tagué sur les murs du lycée des inscriptions hérétiques
Tracts et slogans rouges étaient mes premiers coïts aguerri je mapprêtais à ourdir toutes les conspirations
En cours darabe jai excité la meute à la controverse javais à cette époque-là une voix miraculeuse et mon cur avait lempire sur toute race
Jai vu les mots engendrer une vraie algarade : chacun cognait sur le visage à portée de son poing
Mais jai survécu à la catastrophe avec lenvie de raffermir mon trop-plein de fureur
Et ma tête a été mise à prix jétais mûr au gibet
Et je moctroyai alors toute létendue du risque :
Quand le gong a retenti les chardonnerets ayant fui loin jai convoyé de rouges romances vers des régions vierges. Cétait Allal qui tenait la cadence : nos pas sonnaient à même nos curs
Nous surprenions déjà lhorizon reprisé de la soie de nos mains, la mort qui nétait plus quun corbeau jeté sur la blanche solitude de laube. Et nous exultions aux territoires purs conquis par la seule emprise de nos pensées
Le pays cessait dêtre une terre dépouvante et nous lélevions sur nos épaules et sentions son poids
À notre sang nous inventions des légendes et damples prisons à nos futures épouses
Cétaient des rêves sans fin que nous consumions avec notre dernière cigarette
Enfin pour sceller cette alliance nous reniions nos races le torse plein de souffles bruts et de livres de révoltes
Cétait en un banal jour de commencement du monde !
Je suis le conquérant flottant sur les violentes lames et bientôt je brûlerai les barques et les parfums de ma terre natale
Voilà que jaccoste dans un port que hante le sang
Devant moi mon ennemi et derrière éclats et cendre
[Et je suis loin dans léblouissement
Mais mon coeur bat dune belle audace
Et cest mille fois mort que je reviendrai au monde : lentement jescaladerai le versant abrupt de la vie]
La houle je lai tractée à la rompre sur mes phalanges formées aux flammes ; cétait avec une force que je dois à mon haleine et à mes muscles
Et jai tiré le torse plein de cartes de prodigieuses cargaisons
Alors que les vagues me traversaient dun bout à lautre dans un bouleversement musical
Cest absous dhumanité que je moctroyais limmensité du monde ce minuscule champ de bataille !
Extraits de Guerre totale
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